Adolescence de Netflix est un catalyseur de changement qui n’a que trop tardé, mais il faut éviter les écueils

Des organisations du monde entier spécialisées dans l’engagement des garçons et des hommes diffusent une série de recommandations fondées sur des données probantes concernant les politiques et les programmes visant à résoudre les problèmes soulevés dans la série de Netflix, qui raconte l’histoire du meurtre d’une adolescente par un camarade de classe, et fait écho à des cas réels de violence et de meurtre alimentés par des idées misogynes.

Près de la moitié des garçons américains font confiance à une ou plusieurs voix pro-violence de la manosphère, et 45 % des hommes de la génération Z au Royaume-Uni pensent que les droits des femmes sont allés si loin que la société est discriminatoire envers les hommes.

Ayant suscité un débat public sur l’influence et les méfaits de la misogynie en ligne, Adolescence constitue un catalyseur pour les gouvernements et les institutions telles que les écoles, les universités et les lieux de travail, afin qu’ils prennent des mesures significatives. Cependant, sans une attention particulière, les initiatives visant à résoudre les problèmes soulevés par la série peuvent faire plus de mal que de bien, déclare la coalition.

Les recommandations s’appuient sur des années d’expérience collective et de points de vue divers sur le travail visant à impliquer les hommes et les garçons dans l’égalité des genres à travers le monde. Réunis au sein de l’Alliance MenEngage, des militants de terrain développent depuis près de vingt ans des pratiques visant à impliquer les hommes et les garçons, ainsi qu’à influencer les politiques dans des espaces internationaux tels que les Nations unies.

Au fil des ans, la coalition a collectivement développé et affiné un ensemble de Normes de redevabilité . Élaborées en consultation avec des groupes de défense des droits des femmes, ces normes s’appuient sur les enseignements et l’expertise d’organisations qui travaillent avec des hommes et des garçons du monde entier pour faire évoluer les idées et les normes relatives à la masculinité, pour remettre en question les stéréotypes néfastes sur ce que signifie « être un homme » et pour faire participer les hommes et les garçons aux efforts en faveur de l’égalité des genres.

Ces groupes fournissent aux garçons et aux jeunes hommes des outils pour favoriser des relations saines, comprendre le consentement, intervenir en tant que spectateurs actifs et lutter contre le harcèlement sexuel, tout en s’attaquant aux causes profondes de la violence à l’égard des femmes et des filles, ainsi qu’aux problèmes qui touchent les hommes de manière disproportionnée, par exemple en ce qui concerne la santé mentale.

Joni van de Sand, co-directeur de l’Alliance MenEngage, a commenté l’attention médiatique suscitée par Adolescence:

« Nous nous félicitons de l’intensification du débat public suscité par Adolescence sur la question de la violence à l’égard des femmes et des filles, y compris le féminicide. Mais lorsqu’il s’agit de trouver des solutions aux problèmes soulevés par la pièce, il est essentiel de s’appuyer sur l’expérience, les preuves et les connaissances qui existent en matière de travail avec les garçons et les hommes pour lutter contre les idées néfastes, misogynes et souvent violentes auxquelles les garçons et les hommes en particulier sont exposés. Lorsqu’elles sont mal mises en œuvre, les initiatives et les politiques peuvent accroître la probabilité de dommages. Il est important d’éviter cet écueil ».

Soulignant la question de la radicalisation en ligne, laxman belbase, co-directeur de l’Alliance MenEngage a déclaré :

« Il est important de comprendre que la misogynie que nous observons en ligne n’est pas nouvelle, mais une extension de ce qui existe dans la société depuis des centaines, voire des milliers d’années, mais les outils en ligne la rendent plus intense et plus facile à atteindre à grande échelle. Ces espaces en ligne, collectivement connus sous le nom de « manosphère », regorgent de fausses informations et de récits erronés, affirmant que les femmes et les féministes sont à blâmer pour les luttes des hommes, et que le contrôle des femmes et la domination des autres hommes sont des voies vers le succès et le bonheur. Pourtant, chaque jour, des garçons du monde entier remettent en question de manière critique ces récits néfastes. De nombreux membres de l’Alliance MenEngage créent des espaces, en ligne et hors ligne, où ils peuvent le faire – parce qu’en l’absence d’alternatives positives, des figures comme Andrew Tate remplissent le vide. »

Bien qu’Adolescence se concentre sur une seule tragédie et la culpabilité d’un adolescent, la série met en lumière l’éventail de personnes et d’institutions qui ont un rôle à jouer dans la prévention des cas réels de radicalisation et de violence, y compris le système scolaire, les parents, les plateformes de médias sociaux, les décideurs politiques et les agences gouvernementales.

Les recommandations formulées par l’Alliance MenEngage visent à soutenir les efforts déployés pour engager les hommes et les garçons en faveur de l’égalité des genres et pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles – y compris les femmes et les filles transgenres – ainsi que des personnes non binaires et des personnes appartenant à des genres différents. Ces recommandations proposent des pistes pour aider les hommes et les garçons à mener une vie plus épanouissante, plus saine et plus heureuse.

Alliance MenEngage appelle les gouvernements et les institutions qui jouent un rôle dans la vie des garçons à :

1. Donner aux garçons et aux jeunes hommes les moyens de reconnaître et de contrer les récits haineux et misogynes, à la fois en ligne et hors ligne. Intégrer dans les systèmes éducatifs nationaux des espaces structurés et bien animés où les garçons peuvent discuter ouvertement, s’interroger et réfléchir à ces questions avec leurs pairs et des animateurs formés. Mettre en œuvre des campagnes visant à donner aux garçons et aux hommes les outils nécessaires pour comprendre et remettre en question les messages manipulateurs et misogynes en ligne, et pour favoriser d’autres expressions de la virilité fondées sur la compassion, la connexion, l’amour, l’affection, le respect et l’attention.
2. Augmenter le financement des initiatives en faveur de l’égalité des genres. Étant donné l’urgence de se concentrer sur l’égalité des genres et d’en faire une priorité, nous plaidons en faveur d’une augmentation du financement de l’égalité des genres à tous les niveaux. Il est important de financer un soutien solide, durable et à long terme en faveur de l’égalité des genres et de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles, y compris le travail visant à impliquer les hommes et les garçons.
3. S’attaquer aux causes profondes, et pas seulement aux symptômes, de la violence sexiste. Pendant trop longtemps, les réponses à la violence sexiste se sont concentrées sur ses conséquences. Pourtant, les mouvements féministes de défense des droits des femmes n’ont cessé d’appeler à une approche transformatrice de l’égalité des sexes, en s’attaquant aux facteurs de la violence. Pour ce faire, il faut s’attaquer aux normes, aux attitudes et aux problèmes systémiques sous-jacents qui perpétuent la violence. Concrètement, pour les programmes ciblant les hommes et les garçons, il peut s’agir d’investir dans des programmes de prévention bien conçus, continus et bien animés, parmi d’autres approches complémentaires. Ces initiatives sensibilisent les hommes et les garçons et leur permettent d’examiner l’impact des normes de genre sur eux-mêmes et sur les autres, afin de favoriser un changement profond et durable qui crée une société plus sûre et plus équitable pour tous, y compris pour eux-mêmes.
4. Centrer la responsabilité sur les programmes destinés aux hommes et aux garçons. Les programmes destinés aux hommes et aux garçons doivent être élaborés en étroite collaboration avec des groupes représentant les intérêts des survivants et des victimes de la violence fondée sur le genre. Sans leur consultation, leur contribution et leur examen, les initiatives risquent de ne pas comprendre comment la violence fondée sur le genre et d’autres inégalités entre les sexes se manifestent dans la vie des personnes les plus touchées. Les initiatives doivent s’inspirer de ces réalités vécues, ainsi que des principes d’égalité et des droits de l’homme.
5. Donner aux décideurs politiques et aux éducateurs des outils pour lutter contre les préjudices. Les relations entre la misogynie en ligne, la « manosphère », les diverses réalités des hommes et des garçons, les idées sur la masculinité, l’égalité des genres et la violence sexiste sont complexes et ont un impact sur un large éventail de décisions politiques. Les personnes chargées d’élaborer des politiques sur ces questions, ainsi que les éducateurs et autres personnes travaillant directement avec les garçons, doivent avoir une bonne compréhension, fondée sur des preuves et sur les voix des personnes les plus touchées par ces questions.
6. Tenir les plateformes de médias sociaux pour responsables. Des mesures concrètes doivent être prises pour garantir que les technologies numériques, y compris les plateformes de médias sociaux, constituent une ressource sociale au bénéfice de tous. Les entreprises qui en sont à l’origine doivent être tenues responsables des pratiques qui permettent de nuire, notamment la violence sexiste par le biais d’outils numériques, et la promotion de la misogynie, d’autres formes de discours haineux, de la désinformation et des attaques contre les droits des femmes et les défenseurs des droits de l’homme.
7. Soyez attentifs aux signaux d’alerte. Certaines initiatives citent des défis réels auxquels sont confrontés les hommes et les garçons, tels que les problèmes de santé mentale, l’espérance de vie plus faible et les disparités en matière d’éducation dans certaines régions, pour prétendre à tort à une oppression systémique des hommes et des garçons au profit des femmes et des filles. Ce discours dangereux ignore les preuves accablantes de la marginalisation permanente et des niveaux alarmants de violence fondée sur le genre auxquels sont confrontées les femmes et les filles ainsi que les personnes dont le genre n’est pas confirmé, dans le monde entier, dans les sphères publiques et privées de la vie. L’Alliance MenEngage met en garde les personnes et les institutions qui développent des programmes pour les hommes et les garçons afin qu’elles distinguent sans équivoque les approches positives des groupes dits « de défense des droits des hommes », qui véhiculent des attitudes misogynes, souvent masquées par une préoccupation superficielle à l’égard des garçons.
8. Souligner les avantages de l’égalité des genres pour les hommes et les garçons. Les hommes et les garçons ont un intérêt dans l’égalité des genres. Les normes et stéréotypes de genre étroits et rigides peuvent nuire aux hommes et aux garçons en plus de nuire aux femmes, aux filles et aux personnes non binaires. Mettre en œuvre des politiques et des programmes visant à libérer les hommes des définitions restrictives et étroites de la masculinité, afin d’améliorer leur propre vie, celle de leur entourage et de l’ensemble de la société.

Ces recommandations ont été élaborées en collaboration avec le groupe de travail mondial sur le plaidoyer, le groupe de référence sur la jeunesse et le groupe de travail sur la communication de l’Alliance MenEngage, dont les membres proviennent de divers contextes et régions du monde.

Demandes de renseignements à la presse et d'interviews

L’Alliance MenEngage est un vaste réseau d’acteurs de premier plan qui travaillent avec les hommes et les garçons en faveur de l’égalité des genres et qui s’attaquent aux normes et idées néfastes liées à la masculinité. Pour discuter des possibilités d’interview, ou pour toute autre demande de renseignements des médias, veuillez contacter :

Tom Hornbrook

Responsable de la communication

Secrétariat mondial, Alliance MenEngage

tom@menengage.org